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Je publie ici une nouvelle version de l’histoire de Callisto, destinée à un jeune public. Je l’ai débarrassée de plusieurs complications, comme la rencontre coquine entre Zeus transformé en Artémis et Callisto ou la jalousie d’Héra. Simplifiée ainsi, elle se rapproche de récits de chasse que l’on retrouve un peu partout dans l’hémisphère nord et qui aboutissent à la métamorphose du gibier (souvent un ours, parfois un cerf) en constellation de la Grande Ourse. Un récit qui pourrait nous venir de la préhistoire.
Cette histoire se déroule à une époque où les hommes pensaient qu’il y avait plusieurs dieux. En fait, il y avait un dieu pour chaque chose : le dieu du ciel, le dieu de la mer, le dieu des vents. Ces dieux vivaient sur une montagne qui s’appelle l’Olympe. Leur roi s’appelait Zeus, le dieu du ciel, de la pluie, de la foudre et du tonnerre. De temps en temps, ils descendaient sur la Terre. Ainsi des hommes et des dieux se rencontraient, parfois pour le meilleur, souvent pour le pire.
Voici Callisto ! Son nom signifie la plus Belle. Et c’est vrai qu’elle est jolie. Callisto est la fille d’un roi, le roi Lycaon. Elle a quitté le palais de son père pour rejoindre une troupe de jeunes femmes qui passent leurs journées à courir dans la forêt et à chasser. Leur maîtresse, c’est la déesse de la chasse, Artémis.
Artémis a fixé des règles strictes pour les filles qui forment sa troupe. Elles doivent consacrer toute leur énergie à la chasse. Et elles n’ont pas le droit d’avoir un fiancé. Et par conséquent, pas de bébé. Peut-être plus tard dans leur vie, mais pas tant qu’elles restent avec la déesse. Elles sont heureuses comme cela.
Un jour Zeus, le dieu du ciel, de la pluie, de la foudre et du tonnerre, se promenait sur terre incognito. Il croise Callisto qui cherchait une source d’eau pour remplir sa gourde. Pour l’épater, le dieu touche un rocher de sa main et de l’eau se met à couler. Callisto est surprise par ce miracle :
– Seul un dieu peut faire cela !
– Oui, seul un dieu peut le faire, répond Zeus en souriant.
D’abord effrayée, Callisto apprend à connaître Zeus. Ils deviennent amis … puis petits amis. Callisto et Zeus se voient désormais en cachette pour échapper au regard d’Artémis et de ses compagnes.
Quelques temps plus tard, Callisto remarque que son ventre devient rond. Elle attend un bébé de Zeus. Si Artémis le voit, elle est perdue. Elle devra quitter la forêt et le groupe de jeunes femmes. Et pourtant, c’est la vie qui lui plaît le plus. Callisto ne veut pas y renoncer. Alors elle cache son ventre sous des vêtements amples.
Un jour, après une chasse au cerf effrénée, toute la troupe de la déesse s’arrête près d’une source qui forme un petit lac. Toutes les jeunes femmes sont trempées de sueur. La déesse invite ses compagnes à prendre un bain. N’osant pas retirer son vêtement, Callisto s’assied à l’écart. Mais Artémis à l’œil à tout.
– Callisto, tu n’as pas envie de te baigner ?
– Peut-être plus tard, grande déesse.
– Qu’on lui ôte sa tunique, ordonne Artémis aux jeunes femmes qui sont proches de Callisto.
Deux jeunes femmes s’approchent et enlève sa tunique. Son ventre rebondi apparaît aux yeux de toutes.
– Tu connaissais nos règles, Callisto ! Tu ne peux plus rester parmi nous.
– Pitié, grande déesse. Chasser avec toi et toutes ces femmes, c’est ce qui me plaît le plus.
– Il n’y a pas d’exceptions. Quitte cette forêt et n’y reviens jamais. Sinon tu endureras ma colère.
Artémis et ses compagnes s’en vont et laissent Callisto seule. La pauvre jeune femme erre dans la forêt pendant quelques heures. Mais elle doit se rendre à l’évidence. Il faut qu’elle rentre chez ses parents pour donner naissance à son enfant.
Callisto est désormais la maman d’un petit garçon maintenant. Elle l’a appelé Arcas. Elle l’élève avec ses parents qui sont très heureux d’être des grands-parents. Surtout que le roi Lycaon a maintenant un héritier. Même Zeus vient la voir discrètement de temps à autre.
Callisto n’est pas malheureuse, Mais parfois elle retourne se promener quelques heures dans la forêt interdite. Elle s’assied sur un tronc d’arbre et pleure sa vie d’avant, quand elle courait avec la déesse et ses autres compagnes. Un jour, Artémis l’aperçoit :
– Callisto ? Ne t’avais-je pas interdit de revenir dans cette forêt ? Tu me désobéis à nouveau ! Mais si tu aimes tant vivre dans cette forêt, je vais t’en donner l’occasion.
La déesse disparaît. Callisto ne sait pas trop ce qu’elle a voulu dire. Mais soudain ses membres s’agrandissent. Des poils poussent sur tout son corps. Ses ongles se transforment en d’énormes griffes. Ses dents grandissent et sortent de sa bouche qui s’avance. Ses oreilles remontent sur le sommet d’une tête désormais énorme et toute ronde. Callisto veut appeler au secours, crier. Mais ce sont des grognements qui sortent de son énorme gueule. Callisto réalise qu’elle n’a plus une forme humaine. Elle est devenue une ourse. Mais son esprit humain est toujours là. Elle comprend qu’il lui est impossible de rentrer chez elle, de prendre son fils dans ses bras. Sous cet aspect, elle ne fera qu’effrayer les siens. L’ourse Callisto s’enfonce dans la forêt à la recherche d’une caverne qui deviendra sa nouvelle maison.
Chez les parents de Callisto, on commence à s’inquiéter. Elle s’est absentée plus longtemps que d’habitude. Lycaon, le père de Callisto envoie des serviteurs et des soldats partout dans le pays, mais sans résultat. On la recherche pendant plusieurs jours. Mais au bon d’un moment, il faut se rendre à l’évidence. Callisto a sans doute fait une mauvaise rencontre dans ces bois qu’elle aimait tant ou bien elle a eu un accident. Le petit Arcas grandira orphelin auprès de ses grands-parents. Quant à Zeus, le sort de Callisto l’attriste beaucoup. Mais il ne peut rien faire pour elle. Ce qu’un dieu a fait, un autre ne peut le défaire. Il se contentera de veiller d’un œil sur elle et sur son fils.
Les années passent. Callisto vit dans sa grotte. Elle chasse pour manger, mais ce n’est pas aussi plaisant que lorsqu’elle suivait Artémis. Elle pense beaucoup à son fils qu’elle ne peut approcher.
Arcas grandit. Il devient un jeune homme et son grand-père l’initie à la chasse. Arcas a de qui tenir. Il devient un redoutable chasseur. Il manie l’arc et le javelot avec dextérité. À la mort de son grand-père, Arcas devient même le roi du pays qui prendra son nom, l’Arcadie.
Un jour, Arcas chasse dans la forêt, armé d’un javelot. Attiré par un bruit, il s’éloigne de ses compagnons. Il aperçoit au loin une ourse. L’ourse le sent. Elle le regarde. Cette ourse, c’est Callisto. Son instinct maternel lui parle. Ce n’est pas un chasseur qu’elle a devant elle, mais son fils. Son petit Arcas ! Elle devrait fuir, mais elle s’approche sans méfiance. Arcas voit d’abord son aubaine. Mais il ne comprend pas. Cette ourse devrait s’en aller. Au lieu de cela, elle s’approche. Il prend peur. Il veut lancer son javelot.
C’est alors que sur l’Olympe, Zeus comprend que quelque chose de grave se passe. Il prend de la hauteur. Il les voit : mère et fils qui se font face. Une tragédie se prépare. Un enfant pourrait tuer par erreur celle qui l’a mis au monde. Ou bien une mère pourrait tuer son enfant par instinct de survie. Lui le roi des dieux ne peut pas laisser faire cela. Et puis, c’est sa chère Callisto et son fils Arcas.
Tout va très vite. Callisto et Arcas s’élèvent du sol. Ils sont emportés tout deux vers la voûte du ciel. Tous deux perdent leur apparence terrestre. Ce ne sont plus que des points que l’on peut voir la nuit dans le ciel. Callisto est devenue la constellation de la Grande Ourse et Arcas celle de la Petite Ourse.
Si vous observez le ciel régulièrement, vous remarquerez que la Grande et la Petite Ourse sont deux seules constellations qui sont visibles la nuit tout au long de l’année. De nombreux peuples de l’hémisphère nord possèdent une légende de chasse qui explique l’origine de la Grande Ourse. Le gibier est un cerf ou un ours. Des chercheurs ont fait l’hypothèse que ces histoires pourraient descendre d’une version commune remontant à la préhistoire. Une histoire que les hommes de la préhistoire, de l’époque glaciaire, se racontaient déjà.